Portraits


La Maison par Ralph Lauren

Grande figure de la mode et symbole du rêve américain, Ralph Lauren règne aujourd'hui sur un empire familial de plus de 3,6 milliards d'euros.
Sa cible du moment, l'Europe, où la marque arrive en force dans nos maisons.

Dès qu'il a un moment il dessine des cravates


A 65 ans, Ralph Lauren, le self-made-man par excellence, est sur tous les fronts. Du sol au plafond comme de la tête aux pieds, il habille sa clientèle et, ce qui est plus récent, les intérieurs. Son petit joueur de polo, symbole sportif de la décontraction chic est devenu un emblème et l'homme, un porte-drapeau de la réussite à l'américaine. Retour sur cette success story.
De son vrai nom Ralph Lipschitz, le petit génie de la mode grandit à New York, dans les années quarante, au sein d'une famille juive d'origine russe aux moyens modestes. Il s'intéresse très jeune au monde de la couture et préfère prendre le duc de Windsor et Katharine Hepburn pour modèle plutôt que Marlon Brando. Jeune, l'esprit créatif et l'envie de conquérir la planète, il commence comme vendeur dans une boutique de vêtements.
Dès qu'il a un moment, il dessine... des cravates. Larges, colorées et avant-gardistes, elles séduisent les acheteurs du grand magasin new-yorkais Brummel. Les clients s'extasient, Ralph Lauren a trouvé sa voie ! Il débute en 1967 en lançant une ligne originale de cravates et de foulards qui signe les débuts de la ligne Polo.
En 1968, il sort sa première collection masculine et en 1972 celle destinée aux femmes. Des vêtements qu'il a parfaitement su intégrer dans les
différents styles de vie américains qui l'inspirent, de la Nouvelle-Angleterre au glamour hollywoodien en passant par la culture amérindienne. C'est d'ailleurs en suivant cette fascination pour le mythe "cow-boy" que l'homme enchaîne les collections.

Du papier peint à la musique d'ambiance

En 1975, le modéliste est sollicité pour concevoir les costumes du film Gatsby le Magnifique de Jack Clayton. Son nom est sur toutes les lèvres, sa marque de plus en plus adulée, son signe distinctif, le joueur de polo, reconnu par tous. Dans les années quatre-vingt, tout s'enchaîne. Après les vêtements pour enfants, les accessoires, les parfums et poursuivant sa vision d'un style de vie à l'univers accueillant, il lance en 1983 Ralph Lauren Home marquant ainsi la première ligne complète pour la maison d'un créateur de mode. Depuis, elle ne cesse de s'enrichir de produits aussi divers que le linge, les papiers muraux, les luminaires, le mobilier, l'art de la table et autres accessoires.
En 1986, un immense magasin s'ouvre sur Madison Avenue à New York. Tout l'univers Ralph Lauren y est décliné, du papier peint à la musique d'ambiance. Ce premier concept store fait des émules. Icône de l'authentique et de l'intemporel, sa vision ne consiste pas à créer la mode, mais à instaurer un art de vivre qui transcende les tendances. Ainsi, les étages consacrés à la maison dans les boutiques Ralph Lauren se multiplient dans le monde entier et commencent à arriver en Europe.

Pied-de-poule, jacquard et chevron...

Après Bruxelles et Londres, Ralph Lauren Home vient d'ouvrir à Milan ! Les regards se tournent aujourd'hui vers la France où l'on peut déjà trouver quelques objets et linges de la ligne dans certains grands magasins.
Les trois nouvelles collections printemps-été 2005 conservent les thèmes chers au créateur, les fleurs et les rayures dans les motifs, le chic et le naturel dans les matières. Les mêmes que l'on retrouve également dans ses défilés de mode. Tandis que "Bel Air" s'inspire de l'univers hollywoodien glamour des années quarante, "Lyford Cay" éblouit par ses imprimés aux tons vifs et éclatants et enfin, "Los Cabos" recrée un havre de paix à travers des superpositions aériennes de coloris blanc et sable.
Toutes ces collections sont mises en scène dans les showrooms de la marque de manière raffinée. À l'instar de cette chambre et son lit en rotin fendu naturel avec ses draps ajourés en lin blanc et une pile de coussins tressés de chanvre, de raphia et de jute, le tout disposé dans une pièce claire, aux murs blanchis à la chaux. Le lien mode-déco, important pour le modéliste, est flagrant.
De multiples détails de ses collections vestimentaires sont visibles sur le linge mais aussi la vaisselle, le tissu et les papiers peints. On retrouve le pied-de-poule, le jacquard, le chevron ou encore le cachemire et la soie. Sa patte est indéniable mais toujours aussi discrète, des initiales brodées par-ci, un petit joueur de polo par-là, rien d'ostentatoire. Le principal est que chacun puisse mettre dans son propre intérieur telle parure de draps ou tel service de table comme s'il avait toujours été là. "Dès le début, j'ai dessiné des choses que je voulais pour moi. Que ce soit une veste ou un fauteuil en cuir, cela doit faire partie d'un style de vie et devenir, au fil du temps, de plus en plus personnel".
Dans certains de ses magasins, Ralph Lauren vend même quelques objets qu'il a lui-même chinés. La référence au monde automobile, une autre de ses passions, est également très présente : Bentley pour le nom d'une collection, la fibre de carbone pour un fauteuil, le rappel d'un enjoliveur... Ralph Lauren adore reproduire tout ce qui l'entoure et lui plaît. "J'aime ce que je fais. Je trouve cela vivifiant. Le fait de devoir créer quelque chose de nouveau à chaque saison me régénère. Et puis, je m'amuse. Alors..."

Céline Varnier






Cet article est paru dans Demeures & Châteaux
www.demeuresetchateaux.fr
Octobre 2005