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Jiang Shanqing, l’artiste du trait !

Les œuvres de Jiang Shanqing portent en elles la force de la tradition, celle d’un savoir immuable. Le symbole de l’art chinois depuis des milliers d’années, c’est l’encre ! Et le trait révèle aussi bien l’esprit de l’homme que le mystère de sa culture. Dans ses tableaux, Jiang Shanqing nous révèle que l’art dépasse les limites de ce que perçoit notre regard.
Entretien avec Katya Pellegrino de Luxe Magazine.
Jiang Shanqing

La voie du pinceau est celle de l’esprit et du cœur, elle est portée par l’élan de l’âme. Apprécier l’esprit du trait, relève d’une connaissance élémentaire vieille de milliers d’années selon Jiang Shanqing.
Sa maîtrise de l’encre a nécessité de nombreuses années et a commencé par l’apprentissage de la gravure des sceaux. Cela permet d’acquérir la souplesse et la nervosité nécessaires pour la main qui tient la plume.

D’où venez-vous Jiang Shanqing ?

Jiang Shanqing


Ma mère était professeur et mon père, qui habitait dans la concession française, travaillait dans un centre commercial à Shanghai. J’étais un enfant turbulent, très individuel. A 7, 8 ans je me promenais seul partout, porté par ma curiosité.
Mes parents n’habitaient pas ensemble, car ma mère finissait ses études à Zhejiang et le parti communiste ne permettait pas aux personnes n’habitant pas au même endroit de se retrouver. De ce fait j’habitais en hiver avec ma mère et en été avec mon père.

Quel est le déclic qui vous a amené à vous tourner vers la peinture ?

Mo Tu, encre sur toile, 100 x 73 cm.


Petit j’avais beaucoup d’imagination. Sur les murs de la maison, il y avait des traces de boue et j’imaginais des forêts, des lacs…
Dès mon enfance j’aimais la nature, les livres, mais moins les études (sourires) ce qui ne m’empêchait pas d’avoir de bonnes notes à l’école. A 16 ans, j’arrête les études et je commence à écrire et à travailler avec un maître sur le tampon jusqu’à 19 ans. Durant cette période j’écrivais des articles sur le cinéma qui étaient refusés et enfin à 19 ans, on accepte un article sur le même thème. En 93 je fais ma première exposition individuelle à Canton.

Avez-vous suivi des cours ?

TABLEAU OFFERT PAR L’ARTISTE AU FONDS DE DOTATION ROBERT – DEBRE /


J’ai connu Qiang Jun Dao, grand maître en tampons et de la peinture, grâce à un professeur de littérature.
Un jour, en 1988, je l’accompagne dans ses déplacements et pendant qu’il se repose, je travaille sur la toile du maître. Lorsqu’il se réveille, il me demande si c’est moi qui ait réalisé cette peinture. Acquiesçant, il me confirme que j’ai du talent et me demande de travailler. 3 jours après sur la toile, le maître appose un commentaire et ma peinture est publiée. Ce fut le début de ma carrière.

Quels sont vos thèmes de prédilection en peinture ?

Principalement des paysages, des fleurs et au départ des lotus.

Quelle fut votre évolution dans la peinture ?

En 2008, j’ai commencé à évoluer. Je n’étais plus satisfait de ce que je faisais. Je loue alors un entrepôt de 500 m² à Pékin. Là je m’enferme durant 3 ans et mon inspiration me vient des paysages environnants. Je remarque le reflet de l'eau dans des branches, des arbres et des fleurs, figé par la neige et qui devient des lignes. C’est ce que j’essaie de traduire dans mes peintures.

Avez-vous d’autres sources d’inspiration ?

Jiang


Le temps, le soleil. La vie m’inspire.

Pourquoi êtes-vous venu vous installer en France ?

Depuis 2 ans, je vis entre la France et la Chine. La France est un beau pays qui m’aide à évoluer.
Comme en Chine, je lisais beaucoup de littérature française, tels Balzac, Maupassant, Stendhal, Victor Hugo, Alexandre Dumas, cela m’a donné envie de vivre ici.

Quel regard portez-vous sur la France ?

Ici je me sens détendu. Je peux sortir facilement, il n’y a pas de pollution comme en Chine. Je travaille les petits formats, et en Chine les grands tableaux.

Jiang
Jiang Shanqing et Katya Pellegrino

Peut-on acquérir facilement la maîtrise du trait par l’encre ?

L’usage de l’encre nécessite une concentration du corps comparable aux arts martiaux, et requiert une grande maîtrise spirituelle et morale autant qu’une grande dextérité de la main. Cette aisance demande des années de pratique.

D’où vous vient votre geste d’encre ?

Il provient de l’écriture. Certaines de mes œuvres sont des interprétations d’idéogrammes oubliés. Je compose des poèmes visuels, dont le sens est uniquement sémantique.

Quels sont les traits dominants de votre personnalité ?

Jiang


Je suis quelqu’un de courageux, de déterminé et de direct. Je suis une personne qui réfléchit, et pas naïve.
A mes yeux, « Quand la création devient une partie de votre vie, vous vous rêvez d’être comme l’encre qui s’infiltre dans le papier de riz, mu poétiquement, aussi libre qu’une chanson dans l’air ».
Juin 2016
Par Katya PELLEGRINO