Portraits


Eléna Cantacuzène, créatrice de bijoux

Enfant elle sait qu'elle fera des bijoux, ...un jour. Aujourd'hui, après quelques détours, elle vend dans le monde entier des parures intemporelles et indémodables qui ne ressemblent qu'à elle.

 


 


L'authenticité d'abord

Quand on rencontre Eléna Cantacuzène, il ne faut pas lui dire qu'elle est une créatrice de bijoux. Elle n'aime pas ce terme. Elle préférerait "extirpeur" de quelque chose de nouveau. Mais elle est quand même créatrice.
Il ne faut pas non plus lui parler de ses origines roumaines et grecques remontant à l'an 1000 et lui faire la révérence en l'appelant "princesse" sous prétexte que son aïeul a été empereur de Byzance. Elle n'aime pas du tout. Mais pourtant elle est princesse authentique.
Chez Eléna Cantacuzène tout est authentique, le discours direct, les pierres brutes employées, le caractère bien trempé. Adolescente, son premier emballement l'emmène vers la peinture. Mais ne sachant pas très bien dessiner, bien que bonne coloriste, elle se met à rêver de faire des bijoux pour travailler sur la matière et la couleur, "toucher, tripoter." Elle bricole quelques pièces pour des copines sans imaginer encore en faire un métier.


Un parcours atypique

Envie de se frotter à la vie et d'être indépendante rapidement : à 17 ans, elle délaisse les études et cherche un emploi. Pour elle, le plus important est "de faire ce que tu aimes même si c'est peu ou mal payé."
"Je ne peux pas faire des choses que je ne sens pas. Il faut que je puisse me regarder dans la glace tous les matins. Il y a des concessions que je ne suis pas prête à faire... mais il faut gagner sa vie ! " Elle laisse temporairement le bijou et trouve un job dans un bureau de style de tissus "les matières et les couleurs étaient le plus important pour moi."
De là, Eléna Cantacuzène va composer un chemin professionnel et personnel à l'opposé du conventionnel, à l'image des gens qu'elle apprécie. "J'aime les gens qui ont des parcours atypiques. Ils apportent autre chose que je vais essayer de retraduire dans ce que je fais. J'aime la curiosité des autres, les gens, l'esprit, le regard, tout compte."
Désormais, la vie de la petite princesse sera gouvernée par la liberté, le désir de ne jamais s'ennuyer et les paroles de son père qui résonnent encore dans son coeur "Ce qui compte dans la vie, c'est ce que vous faites, qui vous êtes et non ce que vous représentez."
Elle suit ses désirs et ses besoins. Son job ne lui plait plus elle le quitte. Elle rentre chez Publicis, aux Relations Publiques, puis dans un groupe industriel de textile. Envie de changement, d'aérer son esprit et d'aider les autres, elle intègre Médecins du Monde et s'occupe de la communication pendant quatre ans. "Je saisis les opportunités". Sa vie personnelle suit le même chemin sinueux et romanesque ... mais reste son jardin secret !


Le grand saut

A 40 ans, elle décide "qu'il faut faire ce que j'ai toujours eu envie de faire". Elle ne connaît rien au commerce mais elle se lance. Ses créations intéressent et son premier salon est un succès. Souvenirs de petite fille quand elle voyait les pierres rapportées par son père, éminent ingénieur des Mines, elle marque ses créations des pierres brutes qui les composent. Corail, turquoise, bois, pierre de lave, toutes les matières peuvent devenir merveilles dans la tête d'Eléna Cantacuzène.
En 2006, ses colliers de plumes, ses boucles d'oreilles, bracelets et broches se promènent au cou des femmes des 5 continents. Que des femmes si différentes apprécient ses bijoux, l'émeut beaucoup.
Pour la créatrice puisque créatrice il y a, le bijou raconte l'histoire de l'humanité et plus encore l'histoire de la personne qui le porte. Son inspiration vient de tout : "Tout ce que je fais vient de tout, de l'architecture, de la forme d'une pierre, des couleurs dans un pays, dans un plat. Tout m'apporte. " Autodidacte, elle puise ses idées dans toutes les formes des arts.
Maintenant en plus de ses collections bi-annuelles, elle crée des pièces uniques de joaillerie ou de pierres semi-précieuses pour une personne en particulier. "C'est ce que je préfère. Mon plus beau cadeau est qu'on me dise : c'est exactement ce que je voulais. Cela signifie que je l'ai sentie, comprise. C'est très excitant".

Juin 2006
Par Véronique GUICHARD