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Iznik, l'aventure d'une collection

Il est des collections artistiques et culturelles qui ont une histoire étonnante. Celle des céramiques ottomanes d'Iznik venues jusqu'à nous, à travers cinq siècles, du monde byzantin, du Proche-Orient islamique et de la Chine par la route de la Soie, vient d'être mise en valeur dans un beau livre des éditions de la Réunion des musées nationaux.
On peut aussi aller les admirer au Château d'Ecouen, l'étonnant et trop méconnu Musée de la Renaissance.
Un ensemble exceptionnel, unique au monde

Dans le monde de l'art islamique, Iznik évoque les fameux carreaux de céramiques qui couvrent la plupart des grands monuments de Turquie (mosquées, palais, mausolées), ainsi que les nombreuses pièces de forme (plats, pichets) produites dans la ville du même nom. Il s'agit de l'une des plus étourdissantes productions de céramiques élaborées pendant la grande période de l'Empire ottoman aux XVIème et XVIIème siècles.
La collection de céramiques d'Iznik, l'ancienne Nicée en Turquie, constituée initialement par le Musée de Cluny, était riche de 532 numéros lors de la publication du premier catalogue en 1883 ; depuis, ce fonds exceptionnel de céramiques ottomanes dans les collections publiques françaises n'a été présenté au public que de manière très partielle, à l'occasion d'expositions temporaires, en France ou à l'étranger.
Aujourd'hui rassemblée au Musée national de la Renaissance, au château d'Écouen, cette collection - qui présente principalement des plats, mais également des pichets, des hanaps et des carreaux - fait l'objet d'une publication exhaustive par la Réunion des musées nationaux. On découvre ainsi un ensemble exceptionnel, unique au monde, représentatif de la production de la céramique des ateliers d'Iznik.

Le génie des artistes d'Iznik

Historiens, spécialistes des arts du feu et archéologues tombèrent sous le charme de la variété des décors et coloris de cette production de céramique méditerranéenne.
Cette céramique ottomane est elle-même l'aboutissement et la synthèse de traditions céramiques antérieures, issues à la fois du monde byzantin, du Proche-Orient islamique et de la Chine, par la route de la Soie.
Ce livre présente pour la première fois dans son intégralité la plus importante collection de céramiques ottomanes conservée en France.
La production ici illustrée est contemporaine des règnes du très grand sultan Soliman le Magnifique (1520-1566), et de son fils, Sélim II (1566-1574), ainsi que des sultans de la fin du XVIème et du début du XVIIème siècle qui ont été en relation avec les cours royales européennes : Mourad III (1574-1595), puis Mehmed III (1595-1603), Ahmed Ier (1603-1617).
C'est sans doute dans cette collection que s'exprime le mieux le génie des artistes d'Iznik. Elle constitue l'un des plus beaux répertoires de formes et de motifs de la production d'Iznik au sommet de sa gloire. Le nombre de pièces, leur variété, la maîtrise parfaite de la couleur font de ce livre un catalogue unique en son genre.

Le fameux rouge

Ce sont surtout les plats à décors de fleurs, de cyprès et liés au thème du jardin qui firent la fortune de cette céramique ottomane. Les couleurs éclatantes, le rouge, et le bleu profond sur le fond crème donnent à ces plats un caractère intemporel et toujours précieux. Les artisans de la céramique italienne du XVIème siècle avaient déjà fait la réputation du fameux rouge que seuls les ateliers anatoliens étaient alors capables de réaliser.
Rapprocher la production des ateliers ottomans des majoliques italiennes de la Renaissance était de surcroît particulièrement opportun ; outre les similitudes techniques et stylistiques entre ces deux productions et leur contemporanéité, montrer la coexistence de la production des objets d'art décoratif dans l'Europe chrétienne et ottomane permet de rappeler que ces deux aires culturelles n'ont cessé de commercer et d'échanger, surtout au XVIe siècle, en dépit des affrontements politiques qui culminèrent lors de la bataille de Lépante en 1572.

Cet ouvrage se veut donc être une introduction à l'histoire des échanges culturels entre l'Empire ottoman et la chrétienté pendant la Renaissance, ainsi qu'un témoignage de la richesse exceptionnelle des musées français dans le domaine des collections d'art oriental et plus largement, des arts décoratifs, et des arts du feu en particulier.
Décembre 2005
Par Yves CALMEJANE

Iznik, l'aventure d'une collection
Les céramiques ottomanes du musée national de la Renaissance, château d'Écouen

Par Frédéric Hitzel, chargé de recherches au CNRS, et Mireille Jacotin, conservateur du Patrimoine, musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée 

Préface, d'Alain Erlande-Brandenburg, conservateur général du Patrimoine, directeur du musée national de la Renaissance Du musée de Cluny au château d'Ecouen
26 x 28,5 cm, 336 pages, 500 illustrations en couleurs, prix : 54 €,
éditions de la Réunion des musées nationaux


Musée national de la Renaissance
Château d'Écouen
95440 Écouen.

Téléphone : 01 34 38 38 50
Télécopie : 01 34 38 39 59
www.musee-renaissance.fr


Heures d'ouverture :
 - Musée : tous les jours sauf le mardi de 9h30 à 12h45 et de 14h00 à 17h45 (17h15 l'hiver)
 - Parc : tous les jours (y compris le mardi) de 8h00 à 19h00 en été (15 avril au 30 septembre) et de 8h00 à 18h00 en hiver.
Fermé le 1er janvier, le 1er mai et le 25 décembre.