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Marie-Ann Wachtmeister et Courbet joaillerie : "Sans le bien, le beau n'est rien"

Marie-Ann Wachtmeister, ex-fondatrice des bijoux MAW, est aujourd'hui la créatrice de Courbet pour Manuel Mallen. Un nouveau challenge pour une marque qui se veut éthique et écologique.

Qui êtes-vous Marie-Ann ?

Marie-Ann Wachtmeister

Je suis une Suédoise qui vis à Paris. Je suis passée par plusieurs métiers. Ma famille est éparpillée à travers le monde…
Je me vois comme quelqu’un qui a des racines dans des domaines bien différents. Chacune de mes expériences est un morceau clé du puzzle qui m’a conduit à faire ce que je fais aujourd’hui.

Depuis combien de temps vivez-vous en France et dans quelles circonstances avez-vous choisi de résider dans notre pays ?

Je viens juste de rentrer en France, pays de mon enfance et j’ai décidé de m’y installer pour pouvoir me dédier à Courbet. C’est aussi une façon de répondre à un désir qui date de plus de 30 ans, de rejoindre ma famille ici. Mon frère et mes soeurs, mes parents, vivent en France.

Comment avez-vous connu Manuel Mallen et qu’est-ce qui vous a séduit dans son projet ?

J’ai rencontré Manuel Mallen via Poiray qui exploite l’un de mes modèles/brevets : la bague "Ma Préférence". Nous nous sommes tout de suite très bien entendus. Comme moi, il voit le possible là où la plupart des gens voient la difficulté. Il voit l’opportunité quand tout le monde voit les obstacles. Après son voyage à Anvers, l’idée a germé dans sa tête… Lorsqu’il a quitté Poiray, nous sommes restés en contact, je ne voulais pas le lâcher !

Courbet Joaillerie

Et il m’a parlé de son projet de démarrer une nouvelle marque écologique et éthique, basée sur le diamant de culture et l’or recyclé. “Ce serait super sympa si tu voulais faire ça avec moi” m’a-t-il dit. J’ai accepté !
Pourtant, je m’étais déjà investie dans tant de start up. Je me demandais comment j’allais pouvoir être encore inspirée, disponible à 100%. Les semaines ont passé et j’ai compris que je ne pouvais pas passer à côté d’une telle chance. C’était un projet de rêve ! Ce qui m’a séduit également, c’était de monter la marque au coeur de la place Vendôme. Une chose est sûre, je n’aurais jamais mené ce projet avec quelqu’un d’autre.

Qu’est-ce qui vous a convaincu de vous associer avec lui ?

Il est convaincant comme personne… et inspirant. Nous avions déjà travaillé ensemble. Nous avions une façon de communiquer et de travailler à la fois positive et complémentaire. Un gros projet comme Courbet avait besoin d’un énorme moteur. Manuel et moi sommes des gros moteurs. Nous avons la force de le pousser jusqu’à ce qu’il roule. En somme, nous sommes des entrepreneurs. Manuel est une personne engagée. Il a la personnalité, l’expérience, la vision et l’enthousiasme nécessaires.

Quelle a été votre plus grande appréhension ?

Marie-Ann Wachtmeister

Que mes créations ne plaisent pas, que mes dessins ne soient pas suffisamment « spécial ».
Les produits, c’est ce que l’on vend. Je ne doutais ni des diamants, ni de l’or, ni du concept, ni du showroom, ni de l’équipe, mais de produits qui ne soient pas reconnaissables en tant que Courbet…
J’avais aussi peur qu’il n’y ait pas assez de collection, j’en ai fait beaucoup, j’en ai fait deux fois plus que ce que l’on a lancé.

Qu’est-ce qui a été le plus difficile ?

L’éducation autour du diamant est complexe. Les gens nous posent beaucoup de questions sur l’avenir…
On a aussi vécu la création des écrins comme un vrai challenge. Nous voulions que tout réponde à un cahier des charges éthique et écologique. Nos écrins sont en cuir recyclé, fabriqués dans un petit atelier breton, pour le gainage intérieur. Nous voulions quelque chose de moelleux qui ne soit pas synthétique. Malheureusement le marché des matériaux n’est pas encore assez développé pour que nous y trouvions quelque chose de satisfaisant… pour le moment !

Quelle est votre plus grande satisfaction ?

Courbet joaillerie

C’est de voir les clients aimer les collections. Toutes les lignes plaisent, chacune a son public. La première vente en ligne c’est aussi, bien-sûr, un moment dont nous nous souviendrons.

Vous vous préoccupez de développement durable. A notre époque, n’est-il pas futile de parler de diamants ? En quoi votre action a-t-elle des conséquences sur la planète ?

Consommer de la joaillerie de la façon la plus écologique possible, ce serait de s’abstenir d’acheter et de porter des bijoux pour trouver d’autres symboles, qui plus est immatériels. Mais nous ne croyons pas que cette réalité verra le jour de manière suffisamment étendue pour avoir un impact significatif. Notre mission c’est donc de transformer ce désir de consommation. En achetant un solitaire d’un carat chez Courbet, on évite d’extraire environ 250 tonnes de minerai, on évite de déverser du mercure dans les rivières, et on élimine les risques encourus par les hommes qui travaillent dans les mines. L’empreinte CO2 globale est réduite de manière significative. Il ne faut pas regarder les achats indépendamment mais voir les chiffres consolidés de la consommation totale, en sachant que l’extraction est tellement énorme ! Plusieurs millions de carats par an ! Alors si on peut éviter ça en passant par le diamant de culture, c’est un geste responsable pour la planète.

Vous êtes sensible à l’éthique. Vos exigences en la matière vont-elles au-delà des normes internationales actuellement en vigueur ? Travaillez-vous en lien avec les organisations non gouvernementales sur les problématiques de développement durable et d’éthique ?

Notre production répond aux standards européens. C’est dans notre planning d’obtenir des certifications sur le plan écologique et éthique mais nous sommes encore jeunes, moins d’un an, ce sera mis en place dès que l’on aura un peu plus de temps d’exercice.

Quelle est votre vision de la féminité dans l’époque actuelle

C’est une femme qui a confiance en elle, qui est indépendante, qui s'amuse. Son succès personnel lui permet d’être généreuse en temps et en amour avec sa famille, ses amis, les personnes chères.

Quelle est votre définition du luxe ?

Le luxe, c’est la somme de la qualité la plus haute d’un bien associée à l’empreinte la plus limitée de ce bien sur l’environnement et les personnes. Il faut toujours avoir conscience de ce qu'il coûte à la planète.

Quel est votre comble du luxe ?

Courbet Joaillerie

Arriver à unir, sans compromis, la beauté, la qualité, l’écologie et l’éthique.
Le Blue Hill Farm près de NYC en est un exemple, Babylonestoren au Cap en est un autre du même genre.

Le luxe dont vous ne sauriez vous passer ?

Une alimentation saine, à base d’aliments bio, de grande qualité. Je suis consciente du fait que c’est un luxe, aujourd’hui, mais ca ne devrait pas l’être.
Mars 2019
Par Katya PELLEGRINO