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J’ai pu jouer le parcours de Chambers Bay juste avant l’U.S. Open de golf

Considéré comme l’une des épreuves les plus importantes du circuit professionnel mondial de golf, le 115° U.S. Open se déroule cette année, du 18 au 21 juin prochain, pour la première fois de son histoire sur la côte Nord Ouest des États-Unis. Seul français au milieu de plus d’une centaine de confrères venus du monde entier, j’ai eu la chance de pouvoir jouer, en avant première, ce parcours unique en son genre. Récit d’une journée incroyable sur un parcours incroyable.
Chambers Bay, hôte du 115ème U.S. Open

Avec la présence de Greg Norman


« On est très fiers, sur la côte Nord Ouest des États-Unis et plus particulièrement à Seattle dans l’État de Washington, d’accueillir le 115° U.S. Open. C’est le résultat d’un travail de huit années », c’est par ces paroles que Pat Mc Carthy, une élue responsable du développement de l’État, entama son discours pendant la conférence de presse du « Media Day » de l’U.S. Open 2015.

Conférence de presse à l'américaine

Précédant notre découverte du parcours, cette conférence de presse, très professionnelle et à l’américaine, fut ponctuée par la présence en duplex de San Francisco de Martin Kaymer, le champion allemand tenant du titre.
A la question d’un de mes confrères : « Vous allez défendre votre titre sur un links*, aimez-vous jouer les links ? », le grand champion répondit laconiquement : « J’aime les links quand il fait beau ! ».

Martin Kaymer en duplex de San Francisco pendant la conférence de presse

Voilà qui tombe bien pour moi, il fait très beau aujourd’hui sur Chambers Bay, 52 jours avant le grand évènement.
La chaîne de télé américaine Fox Sports a acquis pour la première fois les droits de diffusion de l’épreuve. Elle profite de cette journée de presse pour, elle aussi, lancer son opération. Greg Norman, le grand champion australien, plusieurs fois vainqueur d’Opens du grand chelem, est ce jour là leur invité sur place. Pour moi c’est l’occasion de le rencontrer de nouveau et d’échanger avec émotion de vieux souvenirs communs notamment sa victoire au British Open de Turnberry en 1986 ( je commentais cette épreuve, accompagné de Patrick Cros, en direct pour Antenne 2, et oui déjà… et gratuitement pour le plus grand nombre… ) ou sa venue dans nos studios de Stade 2 après le Trophée Lancôme de cette même année. Bien sûr, je ne pouvais pas ne pas lui demander ce qu’il pensait du parcours de Chambers Bay. Là aussi, comme Martin Kaymer, il me répondit laconiquement : « C’est un parcours fou et incroyable ! Vous m’en direz des nouvelles quand vous l’aurez joué ! » Je n’ai pas pu aller plus loin dans la conversation, tant Fox Sports, fort de son privilège, s’accaparait le champion, mais me voilà dans l’ambiance et dans l’expectative avant d’aborder le trou N°1.

Chambers Bay ou l'occasion d'échanger quelques souvenirs communs avec Greg NormanPhoto Corky Trewin

Le golf de Chambers Bay, ou comment faire du neuf avec du vieux ?

Chambers Bay en 1961, une carrière de graviers

Golf public, Chambers Bay est un parcours récent. Construit en 2007 par Robert Trent Jones Jr le célèbre architecte américain ( présent sur le site à l’occasion de cette journée ), c’est sur une ancienne carrière, en bordure d’un bras de mer de l’Océan Pacifique dans le Puget Sound à une heure au sud de Seattle, que l’État de Washington a décidé il y a huit ans de construire un links à l’écossaise, dans le but presque avoué à l’époque d’en faire un parcours de championnat. Pour y parvenir, ce sont des milliers de mètres cubes de terre et de sable qui y ont été déversés et modelés par Robert Trent Jones Jr pour devenir huit ans plus tard le lieu de l’U.S. Open 2015, testé avec brio en 2010 avec l’organisation de l’U.S. Amateur.

Chambers Bay aujourd'hui avant l'U.S. Open

Toucher le Graal

Au départ du 1, j'ai pu toucher le Graal

En arrivant tôt le matin sur le site, j’ai ressenti une vraie émotion à la vue du spectacle. En effet le petit club-house de Chambers Bay surplombe le parcours et permet au visiteur de le contempler dans son intégralité. Un panorama époustouflant pour un amateur de golf, avec, 52 jours avant le jour J, des tribunes et des tentes en édification sur tout le parcours ( les organisateurs ont prévu des tribunes en places assises pour 18 000 spectateurs par jour et la venue de 250 000 personnes au cours de la semaine ! ).
Au petit matin avec les premiers rayons du soleil, il me tarde de fouler ce terrain presque déjà mythique.
C’est chose faite en début d’après-midi, après la conférence de presse.
Heureuse surprise, au départ du 1, la coupe du vainqueur, l’original nous dit-on, nous attend ( une copie trône depuis quelque temps à l’intérieur du club-house). J’ai donc pu caresser le Graal avant même de savoir comment les meilleurs professionnels du monde devront s’y prendre à la mi-juin pour la brandir après quatre jours de compétition

Avertissement, dès le 1 !

Le 1, par 4 ou par 5 en fonction du vent pendant l'U.S.Open

Au bout du compte, sur les 18 trous du parcours, 8 ont tout particulièrement retenu mon attention. A commencer par le 1 : un long par 5 de 450 mètres des départs blancs, avec un énorme devers de droite à gauche qui nous met tout de suite dans le bain.
Chad, mon cadet ( les organisateurs ont bien fait les choses, et heureusement… ), un trentenaire costaud qui connaît tous les brins d’herbe du parcours mais ne sait pas encore comment je joue…, me conseille de surtout m’aligner à droite, si possible en évitant d’aller dans le rough. Ce que j’ai la chance de réussir, malgré un cœur battant la chamade pour ce premier coup.

En route pour 18 trous de rêve

Il en fût de même pour mes compagnons de parcours, un japonais, « Rex » Kuramoto, commentateur de golf pour la chaîne Golf Chanel et excellent joueur, un anglais, Adams Ruck, correspondant du Daily Telegraph et un américain, John Ladenburg, un ancien dirigeant du comté, à l’origine de la création du site et chargé de nous guider sur l’histoire du parcours. Excellente mise en bouche.
Mais dès le deuxième coup, chacun a pu constater la difficulté de jouer Chambers Bay et l’importance de bien réussir à placer sa balle. En effet, personne ne réussit à toucher le green en régulation et nous nous sommes tous retrouvés dix mètres en contrebas sur sa gauche ! « C’est toute la difficulté de ce parcours » résuma Chad, très placide. Mais pas seulement, allais-je constater rapidement. En effet, si à Chambers Bay les greens sont immenses, ce sont également de véritables montagnes russes, aussi rapides que des patinoires ! J’en ferai l’amère expérience au 6. Ici, aucun putt n’est « donné », même le plus proche du trou, et encore moins rentré !
Je me contente avec plaisir d’un bogey sur ce trou.
A noter que ce premier trou, tout comme le 18, pourra être joué pendant l’US Open alternativement en par 5 ou en par 4 en fonction des conditions climatiques du jour ( le vent notamment ). C’est une des particularités de l’épreuve cette année.

Des noms évocateurs

Des noms de trous évocateurs...avec un mur de bunkers à franchir au 4

Chacun des trous porte des noms évocateurs. Si le 1 s’appelle « Puget Sound », du nom du bras de mer auquel il fait face, le 4, par 5 en montée léger dogleg droite, se nomme « L’accent du danger » et porte bien son nom. Les meilleurs joueurs tenteront de prendre le green en deux coups, en réussissant un deuxième coup dantesque très long pour passer au dessus d’une mer de bunkers accrochés à la colline. « Rex » tente ce coup, hélas sans succès pour lui. Il sera très heureux de faire le par, alors qu’il espérait avant son deuxième coup n’avoir qu’un putt à tenter pour l’eagle…

Deuxième coup de Rex Kuramoto sur le 4

A première vue, en arrivant au départ du 6, par 4 de 432 mètres léger dogleg droite en montée, je ne comprends pas pourquoi il porte le doux nom de « Deception point » tant il ne paraît pas si compliqué et si difficile que cela. Je le saurai une fois sur le green. C’est en effet là que se situe le fameux endroit où j’ai failli connaître une cruelle déception à mon premier putt, il est vrai difficile et en pente. Je vois ma balle ne pas du tout suivre la direction escomptée, partir à droite au lieu de prendre la pente de gauche, et descendre presque inexorablement vers un profond bunker situé à droite du green. Elle ne s’arrête qu’à quelques centimètres de l’obstacle, très loin du trou. Trois putts plus tard, elle atteint son but ! Déception point ?

Vers le green du 6 qui porte bien son nom

Le 8 : une étrange ressemblance avec le 17 du Golf National


Le 8 de Chambers Bay, une copie à l'envers du 17 du Golf National

En abordant le 8, par 5 de 461 mètres en continuelle montée, j’ai l’impression de voir le 17 du Golf National, mais à l’envers. Le flanc du trou est à gauche ici, alors qu’en France il est à droite, mais il paraît tout aussi ardu et est d’ailleurs considéré comme le plus difficile du parcours. Par jour de fort vent de face, faire avancer sa balle doit être un calvaire. Très heureux d’arriver en 4 coups à une dizaine de mètres du drapeau sur un green long, bosselé et étroit, je réussis LE putt pour le par malgré une méchante pente ! Le premier par de la journée sur le trou le plus difficile de Chambers Bay, je ne l’oublierai jamais, ni les félicitations et les compliments de mes compagnons de jeu, joueurs comme cadets !
Pour terminer l’aller, le 9 est un très beau par 3 en descente de 182 mètres avec un dénivelé de 30 mètres. Dénommé « Olympus » en référence à la chaîne de montagne « Olympic Mountains » que l’on peut apercevoir au fond dans la direction du Puget Sound. Du tee de départ, point culminant du parcours, la vue est magnifique. Objectif : jouer à gauche pour éviter les très impressionnants bunkers défendant le green situé en contrebas.

Le 9, point culminant du Parcours de Chambers Bay

Pour l’U.S. Open, il est possible qu’un autre tee de départ soit utilisé en alternance avec celui-ci. Il sera situé à 90° de ce dernier, mais plus bas que le green, transformant ce par 3 en descente en un par 3 en montée !
Une première là aussi pour un Open du Grand Chelem, tout comme pour l’alternance en par 4 ou par 5 des trous 1 et 18.

Un retour dans le vent

Chambers Bay sera à l'heure pour l'U.S. Open. Départs du 1 à gauche et du 10 à droite.

Dès l’attaque du 10, « Hautes dunes », Chad me conseille de jouer si possible des balles basses, « Scottish ball ! » me précise-t-il. En effet, sur ce trou on s’enfonce en direction de la mer et les balles hautes, surtout si elles dépassent les dunes, subissent les affres d’Éole. Le green quant à lui est surélevé et toujours protégé par des dunes en forme de cirque. Les conseils de Chad sont les bienvenus, je réussis à faire mon deuxième par sur ce trou.

Le 10, surtout jouer des balles basses

Le 12 porte bien son nom, « Le goulet ». C’est un par 4 de 236 mètres, assez court donc mais en forte montée et surtout très étroit avec à gauche et à droite des roughs très accueillants. Un trou à eagle ou… à triple bogey ! Un long frappeur tentera de toucher le green du premier coup pour l’eagle, ce fut le cas pour « Rex » et John, mais une balle dans le rough est synonyme de trou catastrophe, ce que fit Adams, 3 coups pour en sortir et trois putts : triple bogey ! Pour ma part, je suis très heureux de faire le par sur ce trou, en deux sur le green et deux putts, avec en prime les félicitations de Chad.

Des roughs très voraces

Les cadets nous avaient prévenu et on le savait depuis le départ, il faut surtout éviter d’aller dans les roughs. Chacun d’entre nous en a fait la malheureuse expérience (sauf « Rex »), ici les roughs sont très gourmands. Faits d’une herbe grasse, drue, profonde et très verte, il faut d’abord commencer par retrouver la balle ( merci les cadets ). Ensuite vient le plus difficile, il faut en sortir. Pour cela, il est nécessaire de faire preuve d’humilité et de tenter de se remettre sur le fairway sans vouloir aller trop loin. Une seule solution : prendre le club le plus ouvert possible en fonction de la distance escomptée et frapper avec des poignets très fermes. Il sera intéressant de voir comment les pros s’en sortiront pendant l’U.S. Open si par malheur ils lâchent quelques coups à droite ou à gauche dans ces satanés roughs.

Le trou signature

Robert Trent Jones Jr devant le trou signature de son œuvre

Il me tardait depuis longtemps d’y arriver. Le 15, petit par 3 de 110 mètres en légère descente ( mais qui peut aller jusqu’à 220 mètres, ce sera le cas pour l’U.S. Open ) est le trou signature de Chambers Bay. Il se nomme « Lone Fir », du nom donné au seul arbre du parcours, un sapin situé juste derrière le green non loin du Puget Sound. C’est une sorte de phare que l’on aperçoit depuis la plupart des trous, une sorte de référence aussi pour se situer. Déjà, au départ du 12 on le côtoie. Et enfin, on y est. Photo obligatoire. C’est vrai, il est très beau. Même s’il est considéré comme le trou le plus facile du parcours, il peut s’avérer très dangereux en fonction de la position du drapeau.

Départ du 15, le trou que des millions de golfeurs vont rêver de jouer après l'U.S. Open

C’est le cas pour nous, aujourd’hui le drapeau est situé très près du bunker d’entrée de green.
Ma balle frappe la lèvre du bunker pour finalement y échouer… mais j’arrive à en sortir.
Un putt de deux mètres et c’est le par. J’en ferai deux… « It’s a jetlag putt » me lance « Rex » pour me consoler. J’accepte sa remarque, fraîchement débarqué la veille de Paris.

Un putt de 2 mètres pour le par sur le 15 de Chambers Bay

Finishing hole

En sortant du 17, je suis surpris par le passage d’un long train de marchandises qui circule entre le parcours et la mer en longeant les 16ème et 17ème trous, un clin d’œil sans doute au fameux 11ème trou du Old Course du Royal Troon qui lui aussi longe une voie de chemin de fer.
Enfin le 18. Appelé « Tahoma », du nom indien donné au mont Rainier qui culmine au dessus de Seattle, c’est un sacré dernier trou qui ne peut laisser indifférent.

Le 18, fantastique finishing hole...

Par 5 d’une longueur de 463 mètres en montée, entouré de dunes et de bunkers. Il faut absolument éviter tous les nombreux obstacles, roughs comme bunkers, pour espérer scorer, dont un fameux bunker de parcours invisible de l’endroit où l’on se trouve, situé au milieu du fairway à 110 mètres du green, mais très profond et très accueillant pour les deuxièmes coups qui n’auraient pas réussi à le contourner.

Au 18, il faut à tout prix éviter le bunker de milieu de fairway !

Adams connaît le privilège de le visiter, il y descend grâce à un escalier, mais, trop profond pour pouvoir expédier sa balle en direction du trou, il est obligé de la faire sortir par le côté pour finalement la voir atterrir dans le rough…
Le green de ce trou est lui aussi immense avec des pentes et doubles pentes insensées.
J’imagine déjà comment les organisateurs de l’US Open vont s’amuser à placer les drapeaux pour jouer avec les nerfs des champions qui vont défier ce fabuleux « finishing hole » afin de conclure ce parcours « fou et incroyable », comme me le laissait entendre à juste titre Greg Norman quelques heures plus tôt.

La coupe de l'U.S. Open en bonne place dans le club-house

Retour de l’US Open à Chambers Bay ?


A la question d’un de mes confrères américains « Pensez-vous que Chambers Bay puisse de nouveau accueillir l’U.S. Open ? », Mike Davis, le directeur exécutif de l’USGA ( la fédération américaine de golf ) répondit : « J’en serais très heureux, c’est ici encore un jeu plus excitant que n’importe où ailleurs, mais nous ferons le point juste après le déroulement de cette 115° édition. »
Ce ne sera de toute façon pas avant 2022, les lieux des six prochains U.S. Opens étant déjà désignés !

L'entrée du petit club-house de Chambers Bay

*Links : nom donné aux parcours de golf écossais situés dans des dunes de bord de mer. Chambers Bay revendique l’appellation de « Pure Links Golf ».



Mai 2015
Par Jean-Louis CALMEJANE

Chambers Bay Golf Course
6320 Grandview Drive West
98467 University Place (Washington)
United States
Tél. +1 877 295 4653
http://www.chambersbaygolf.com/
info@chambersbaygolf.com

Hôtel:
Hôtel Murano
1320 Broadway Plaza
Tacoma
WA 98402
United States
www.hotelmuranotacoma.com

Mon avis:

J’avais remarqué Chambers Bay dans le guide « Rolex des 1000 meilleurs golfs du monde », dont nous avons déjà parlé sur notre site, et il mérite largement sa note de 90/100. L’U.S. Open va lui apporter une notoriété encore plus importante.
Pour moi qui adore jouer les links, c’est un des plus beaux et plus intéressants qu’il m’ait été donné de jouer. Mais il faut savoir en l’abordant que c’est un parcours difficile et exigeant, « tough » comme ils disent là bas où ils sont aussi très fiers de leurs cadets. Michael Greller celui de Jordan Spieth, le jeune champion prodige américain et dernier récent vainqueur du Masters, est un ancien cadet de Chambers Bay, c’est dire si ce parcours est aussi formateur !
Chambers Bay est un golf public, le club-house est tout petit et ne dispose pas de vestiaires, il est préférable de le savoir avant de venir, de plus il est indispensable de réserver son départ longtemps à l’avance.
Si vous voulez en savoir plus encore sur ce parcours et le prochain U.S. Open, je ne peux que vous conseiller de surfer sur deux autres sites :
www.usopen.com où vous pourrez voir ou revoir (entre autres) quelques grands moments de l’histoire de l’épreuve, depuis 1913 jusqu’à nos jours ; je vous recommande (entre autres encore) 1947 avec Sam Snead et 1971 avec Lee Trevino et Jack Nicklaus. Vous pourrez revoir en vidéo le parcours trou par trou ( et vérifier si je n’ai pas dit de bêtises ) en cliquant sur l’onglet « course ».
www.foxsports/golf vous permettra de voir les moyens mis en place par la chaîne pour couvrir l’évènement, ils sont assez considérables. Vous pourrez aussi suivre l’épreuve heure après heure.